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Améliorer la puissance du laser ultraviolet pour diversifier ses applications

30 mars 2023 | Julie Robert

Mise à jour : 31 mars 2023

Une équipe de recherche découvre un nouveau phénomène optique qui fait appel à des états d’autoionisation sombres.

Laboratoire ALLS (Advanced Laser Light Source) du Centre Énergie Matériaux Télécommunications. JOSÉE LECOMPTE

Une équipe de recherche internationale dirigée par les professeurs Tsuneyuki Ozaki et François Légaré de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) a mis au point une méthode unique pour accroître la puissance d’une source laser générant des impulsions de lumière dans le spectre de l’ultraviolet extrême (UVE). Le mécanisme sous-jacent du phénomène observé récemment mise sur le rôle unique de types spéciaux d’états électroniques, connus sous le nom d’états d’autoionisation sombres.

Grâce à ces travaux, l’équipe sera en mesure d’étudier la dynamique ultrarapide d’un état d’autoionisation sombre unique à l’échelle des femtosecondes. Ce qui était auparavant impossible en raison de l’incapacité de ces états à subir une émission ou une absorption monophotonique, associée à leur durée de vie ultracourte, de quelques femtosecondes.

Publiés récemment dans la revue Physical Review Letters, leurs résultats permettent la génération de lumière ultraviolette extrême ultrarapide pertinente pour des applications scientifiques telles que la spectroscopie de photoélectrons résolue en angle et la microscopie photoélectronique.

De nombreuses limites imposées par les principes fondamentaux de la physique des lasers restreignent la plupart des lasers utilisés en médecine, en communication ou dans l’industrie. De même, ils ont tendance à fonctionner uniquement dans la gamme de longueurs d’onde ultraviolette, visible (de violet à rouge) ou dans la gamme de longueurs d’onde invisibles du moyen et proche infrarouge. Cependant, de nombreuses applications scientifiques avancées exigent que les lasers fonctionnent à des longueurs d’onde plus courtes dans la gamme des ultraviolets extrêmes.

« Nos résultats constituent une avancée importante dans la compréhension du comportement des états autoionisants sombres dans le cadre d’interactions laser-matière ultrarapides intenses. Il s’agit aussi d’une percée dans l’intégration de sources de laser ultraviolet intense des d’installations de rayonnement synchrotron à grande échelle et de laser à électrons libres aux laboratoires d’analyse de produits laser de taille moyenne. »

Mangaljit Singh, doctorant à l’INRS et auteur principal de l’étude

Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec le professeur Vasily Strelkov de l’Institut Prokhorov de physique générale de l’Académie russe des sciences, en Russie, et le professeur adjoint de recherche Muhammad Ashiq Fareed de l’Université du Nebraska-Lincoln, aux États-Unis.

Élucider les mystères des états d’autoionisation sombres

Dans les laboratoires du Centre Énergie Matériaux Télécommunications, l’équipe a réalisé ses travaux grâce à la génération d’harmoniques de haut niveau, un phénomène optique non conventionnel de la physique du laser.

Les systèmes de pointe utilisent des sources laser primaires disponibles sur le marché pour générer des harmoniques de haut niveau à partir de gaz nobles afin de développer des sources secondaires de lumière ultraviolette extrême cohérente. Dans cette étude, au lieu des gaz nobles, Mangaljit Singh et ses collaborateurs ont utilisé un panache obtenu à partir de l’ablation au laser d’un matériau solide pour la génération d’harmoniques de haut niveau en synchronisation avec la réponse unique des états d’autoionisation sombres.

Ils ont découvert que, dans certaines conditions de résonance régies par les paramètres du laser primaire et la structure électronique des espèces atomiques et ioniques dans le panache ayant subi une ablation par laser, l’efficacité de la conversion, et, par conséquent, la puissance de la source de rayonnement ultraviolet extrême est multipliée par plus de dix. Ainsi, la même puissance ultraviolette extrême peut être obtenue à l’aide d’un laser primaire avec une puissance égale à un dixième de la puissance requise pour un gaz noble type.

En plus d’avoir révélé une source intense de lumière ultraviolette extrême, cette étude montre également pour la première fois la perspective d’étudier la dynamique des états d’autoionisation sombres à l’échelle des femtosecondes au moyen de la technique de spectroscopie d’harmoniques élevées. De tels états sombres pourraient servir de base à plusieurs technologies quantiques, en particulier pour améliorer la performance de l’informatique quantique.

Les expériences ont été réalisées au laboratoire de sources femtosecondes, aussi connu sous le nom laboratoire ALLS (Advanced Laser Light Source) de l’INRS, une infrastructure unique axée sur le laser qui fournit un arc-en-ciel de lumière cohérent, et des postes de travail de pointe à ses utilisateurs. ALLS fait partie de LaserNetUS, un consortium d’installations de laser à grande puissance en Amérique du Nord qui fait progresser la recherche sur la science du laser.

À propos de l’étude

L’article Ultrafast resonant state formation by the coupling of Rydberg and dark autoionizing states, de Mangaljit Singh, Muhammad Ashiq Fareed, Valeryia Birulia, Alexander Magunov, Alexei N. Grum-Grzhimailo, Philippe Lassonde, Antoine Laramée, Romain Marcelino, Ramin Ghahri Shirinabadi, François Légaré, Tsuneyuki Ozaki et Vasily Strelkov a été publié dans la revue Physical Review Letters. L’étude a reçu un appui financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.