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L’ingénierie du microbiote des plantes

16 août 2021 | Audrey-Maude Vézina

Mise à jour : 18 août 2021

La série « Tour d’horizon en trois questions » met en valeur la recherche sous toutes ses formes et porte un regard éclairé sur l’actualité.

Une plante dans un pétris

Le microbiote joue un rôle central dans la santé et la productivité des plantes.

Le professeur Étienne Yergeau, du Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie, se spécialise en écologie microbienne. Ses recherches se concentrent sur le microbiote des plantes, c’est-à-dire les dizaines de milliers d’organismes qui vivent dans le sol.

Cette communauté microbienne joue un rôle central dans la santé et la productivité des plantes. Le professeur Yergeau cherche donc à manipuler le microbiote afin d’apporter des solutions à plusieurs problèmes pressants, tels que la contamination de l’environnement, le déclin de la productivité agricole et les changements climatiques.


Comment le microbiote des plantes affecte-t-il leur croissance et leur résistance aux stress environnementaux ?

De plusieurs façons ! D’abord, le microbiote peut moduler le niveau d’hormones végétales dans la plante. Ces hormones sont en partie responsables de la croissance des tiges et des racines ainsi que de la perception que la plante a de son environnement. Elles peuvent donc inhiber ou favoriser la croissance et la résistance de la plante aux stress, comme la sécheresse et les attaques par les phytopathogènes.

Par ailleurs, certains membres du microbiote sont capables de modifier la disponibilité des éléments nutritifs critiques, comme l’azote et le phosphore, et même de fixer l’azote atmosphérique, ce qui est la seule façon naturelle pour cet élément critique d’entrer dans les écosystèmes terrestres !

D’autres membres du microbiote peuvent protéger les plantes des microorganismes pathogènes, en leur bloquant simplement l’accès à la plante, ou encore en générant et en sécrétant des antibiotiques !


Quelles méthodes peuvent être utilisées pour modifier les communautés microbiennes du sol selon les cultures ?

Nous venons justement de publier un article scientifique qui passe en revue les principales méthodes pour modifier le microbiote des plantes. Ces trois approches s’inspirent de la théorie des communautés écologiques : la dispersion, la sélection et la spéciation.

La plupart des méthodes actuellement sur le marché s’inspirent de la dispersion, en inoculant des microorganismes sélectionnés pour leurs propriétés bénéfiques sur les plantes ou dans le sol, comme des inoculums de champignons mycorhiziens à arbuscules ou de rhizobiums.

Étienne Yergeau

Les méthodes basées sur l’approche de sélection utilisent essentiellement les microorganismes déjà présents. Elles visent à augmenter la quantité de ceux qui sont les plus bénéfiques pour la plante.

Finalement, les méthodes de spéciation sont utilisées pour modifier les fonctions de microorganismes déjà associés à la plante, soit en les faisant évoluer ou en utilisant le transfert horizontal de gènes, un mécanisme naturel par lequel les microorganismes s’échangent des gènes.


Quels sont les pièges à éviter lors de la manipulation du microbiote ?

Un des pièges les plus courants est de ne pas prendre en compte la complexité et la diversité de l’écosystème microbien. C’est particulièrement vrai lorsqu’on parle du sol, un des environnements microbiens les plus diversifiés sur la planète.

Cela fait en sorte que les efforts de manipulation sont souvent vains ou que les résultats sont très variables selon les environnements, compte tenu de la résilience du microbiote déjà en place.

Pour réussir, il faudra être plus malin que le microbiote et s’inspirer des règles écologiques qui régissent les communautés de microbes.

Étienne Yergeau

Par exemple, on pourrait sélectionner les plantes agricoles selon leur propension à s’associer à un microbiote bénéfique ou utiliser le transfert horizontal pour intégrer naturellement des gènes bénéfiques dans des microorganismes déjà bien installés dans la rhizosphère.