- Ma recherche en série
Assouvir sa passion pour la chimie organique et découvrir le vaste monde de la recherche.
Sitan Diarra au laboratoire. Photo © Fanny Froton
Mon parcours a commencé à la suite de ma licence en chimie en France, l’équivalent du baccalauréat au Québec. Je voulais faire un master professionnel et c’est sous les conseils d’un professeur que je me suis lancée dans la recherche. Ma première année de maitrise en chimie m’a permis de réaliser que je portais un amour inconditionnel pour la chimie organique, une discipline qui allait devenir ma spécialisation finale. Une fois ma maitrise en poche et poussée par le goût de l’aventure, j’ai fait mes bagages, direction : le Québec! Je suis d’abord arrivée à l’Université de Montréal pour effectuer ma thèse en chimie organique, mais l’environnement ne me correspondait pas.
C’est à ce moment que j’ai découvert le laboratoire du professeur David Chatenet, par le biais d’une courte collaboration. J’ai tenté ma chance et me voilà aujourd’hui inscrite à l’INRS.
Je suis tombée sous le charme de l’approche multidisciplinaire de la recherche menée dans son laboratoire (chimie, biologie, pharmacologie). Je réalise mon rêve de faire mes propres tests biologiques et pharmacologiques sur mes composés synthétisés!
Selon l’OMS, les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde. On estime à 17,7 millions le nombre de décès imputables aux maladies cardiovasculaires, dont 7,4 millions seraient dus à une cardiopathie coronarienne et 6,7 millions à un AVC (chiffres 2015).
Les maladies cardiovasculaires constituent ainsi un défi majeur de santé publique. Ma thèse consiste en quelque sorte à apporter une solution à ce problème.
Comment? En travaillant sur le système urotensinergique! Ce dernier, principalement impliqué dans la régulation des systèmes rénal et cardiovasculaire, est considéré comme un acteur crucial pour la pathogenèse et la progression de nombreuses maladies cardiovasculaires comme l’athérosclérose pour laquelle il n’existe pas de traitement efficace. Ce système est composé d’un récepteur et de deux peptides produits par l’organisme. Ces deux chaînes courtes d’acides aminés activent différemment le récepteur et peuvent à la fois protéger ou nuire au bon fonctionnement du système cardiovasculaire en fonction des voies de signalisation intracellulaires qui sont activées. Afin de développer un traitement efficace avec moins d’effets secondaires chez les patients, il est impératif de concevoir des ligands biaisés (scalpels moléculaires) capables de se lier au récepteur et d’activer uniquement les voies potentiellement cardioprotectrices.
Au cours des dernières années, notre équipe a découvert deux ligands qui possèdent certaines des caractéristiques désirées. Mon projet consiste à améliorer leurs activités biologiques et leurs propriétés pharmacologiques pour un éventuel traitement des maladies cardiovasculaires. Je vais donc synthétiser et tester dans divers systèmes biologiques in vitro et ex vivo de nombreux ligands. L’objectif est de mieux comprendre les paramètres physico-chimiques au niveau du ligand responsable de l’activation spécifique de certaines voies de signalisation.
Ce projet de doctorat, en plus de sa vaste portée scientifique dans divers domaines, me permet de sortir de ma zone de confort et de mieux comprendre la genèse et la progression des maladies cardiovasculaires, dont certains membres de ma famille ou proches sont atteints du fait des facteurs environnementaux.
En effet, de nombreuses populations africaines vivent sous le seuil de la pauvreté et l’accès aux soins adéquats est très souvent quasi inexistant ou limité à une classe sociale. L’OMS a ainsi rapporté en 2015 que les trois quarts des décès liés à ces maladies surviennent dans les localités avec un faible ou intermédiaires revenu. Comparée au fardeau mondial des maladies cardiovasculaires, la population africaine touchée est généralement plus jeune, majoritairement féminine et issue pour la plupart de communautés défavorisées.
Le fameux doctorat on y revient…. C’est avant tout une aventure humaine et formatrice sur tous les plans. Cela est d’autant plus vrai quand on décide de s’aventurer à des milliers de kilomètres de son pays natal (Mali) et très loin des siens (France).
Depuis mon arrivée dans l’équipe du professeur Chatenet, je me suis construit un nouveau cercle d’amis dans plusieurs équipes qui est devenu mon réseau. Mes habitudes peuvent avoir été chamboulées, mais mon amour de la recherche me permet d’apprécier ce parcours que j’ai choisi.
Quand on a l’occasion de participer ou d’assister à de nombreux congrès, d’y rencontrer de nouveaux chercheurs, de forger sa culture et ses connaissances, tout en faisant évoluer son réseau… la vie est belle !
J’ai la chance d’avoir un directeur incroyable, toujours présent pour nous aider et nous guider. David Chatenet est également un excellent pharmacochimiste, et que dire de sa mémoire pour retenir les noms des auteurs et le titre de chaque article qu’il lit!
À la fin de ma thèse, j’espère pouvoir vous dire que nous avons identifié un ligand pouvant être utilisé chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires. Je pourrais ainsi commencer une nouvelle aventure ici ou ailleurs !
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