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Le Groupe de recherche en traitement optique ultrarapide de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) repousse les limites des lasers pulsés ultrarapides. Comme le rapporte Nature Photonics, les chercheurs de l’équipe du professeur Roberto Morandotti ont créé le laser pulsé nanoseconde ayant la plus basse largeur spectrale jusqu’à présent, de cent fois inférieure aux lasers conçus auparavant.
Ce laser à synchronisation modale passive, de structure compacte, a une faible consommation d’énergie et la capacité unique de caractériser l’ensemble du spectre laser dans le domaine des radiofréquences (RF). Ces caractéristiques ouvrent la voie à l’intégration sur puce pour des applications inédites de détection et de spectroscopie. Les lasers pulsés émettent des trains d’impulsions lumineuses intenses. Ils ont permis d’observer de nombreux phénomènes dans divers domaines de recherche et servent d’assises aux expériences de pointe en physique, en chimie, en biologie et en astronomie. Or, les impulsions à haute intensité et à faible taux de répétition produisent un fort bruit de fond qui nuit aux analyses.
Pour cette raison, l’équipe s’est tournée vers des systèmes laser à mode synchronisé passif : ils génèrent un bruit de fond beaucoup plus faible. Ces systèmes ont notamment permis de créer des références stables de fréquence optique pour la métrologie (prix Nobel 2005) et des impulsions ultrabrèves intenses (c.‑à‑d. des impulsions à cycle unique de l’ordre de l’attoseconde) pour l’étude des interactions haute intensité entre la lumière et la matière.
Ainsi, dans sa dernière publication, l’équipe de recherche de l’INRS présente une architecture laser inédite qui tire profit des récentes percées en optique des microcavités non linéaires pour repousser encore les limites de la connaissance. Cette architecture utilise des résonateurs en forme de microanneau ayant la capacité de filtrer des bandes spectrales étroites. Ces résonateurs rendent possible la génération d’impulsions nanosecondes par synchronisation modale.
« L’impulsion générée par notre laser a une bande spectrale si étroite qu’elle échappe aux analyseurs de spectre optique de pointe », a expliqué Michael Kues, stagiaire postdoctoral et principal auteur de l’étude. Pour caractériser la largeur de bande du laser, les chercheurs ont donc fait appel à une technique de battement optique cohérent.
L’étroitesse extrême de la bande spectrale du laser est un atout puisqu’il a permis de faire appel à des appareils électroniques courants pour mesurer l’ensemble des caractéristiques spectrales d’un laser à synchronisation modale du domaine RF. Il s’agit d’une première : des instruments de pointe doivent habituellement être mis à contribution pour effectuer ce type de mesure.
D’un point de vue pratique, les sources pulsées ultrarapides ayant une bande spectrale étroite stable sont particulièrement recherchés pour développer des applications de détection et de microscopie, mais aussi pour exciter efficacement des atomes et des molécules. Du côté de la recherche fondamentale, le contrôle des modes laser optiques et la compatibilité RF du spectre associé de ce nouveau laser favoriseront grandement l’étude des régimes de couplage modal non linéaire et de synchronisation modale complexe.
Publié dans Nature Photonics, l’article « Passively mode-locked laser with an ultra-narrow spectral width » (DOI : 10.1038/nphoton.2016.271) est le fruit d’un partenariat international de recherche entre le Québec, le Royaume-Uni, la Chine, la Russie et l’Australie. Michael Kues, du Centre Énergie Matériaux Télécommunications de l’INRS, en est l’auteur principal. L’étude du Groupe de recherche en traitement optique ultrarapide pilotée par le professeur Roberto Morandotti a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) par l’intermédiaire des programmes de bourses Steacie, des Chaires de recherche du Canada et de subventions à la découverte, par le Soutien à des initiatives internationales de recherche et d’innovation (SIIRI) du Programme de soutien à la recherche (PSR) du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation (MESI) du Québec et par le programme de découverte du Conseil australien de la recherche.