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Les civilisations ont connu l’âge de pierre, de bronze et de fer. C’est maintenant au tour des matériaux quantiques de révolutionner nos vies grâce aux travaux des chercheurs de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et de l’Université McGill.
Le professeur Emanuele Orgiu, chercheur à l’INRS et spécialiste des matériaux quantiques. De l’épaisseur de quelques atomes, ces matériaux ont des propriétés optiques, magnétiques et électriques remarquables. Ses recherches se concentrent sur la création de motifs à la surface des matériaux quantiques pour en changer les propriétés fondamentales.
« La forme que l’on donne à ces dessins va influencer les propriétés induites à la surface », lance le professeur.
Cela pourrait servir pour des dispositifs (opto)électroniques, tels que les transistors et les photocapteurs, mais aussi pour les dispositifs de biodétection.
L’expert en matériaux quantiques vient de faire un grand pas vers l’avant en synthétisant des macrocycles, de grosses molécules circulaires, sur une surface de graphite. Ce matériau est constitué d’un empilement de graphène, un feuillet de l’épaisseur d’un seul atome composé d’atomes de carbone. Le graphène est considéré comme un matériau quantique.
« Imaginez les macrocycles comme de petits blocs Lego. Si on cherche à faire la construction d’un anneau en solution, c’est-à-dire dans un mélange homogène où les blocs sont dilués, ce n’est pas possible. Par contre, si on les met sur une table, on arrive à le faire », rapporte le professeur Orgiu, auteur principal de l’étude dont les résultats ont été publiés en ligne le 18 février dans la revue ACS Nano.
La chercheuse postdoctorale du groupe d’Emanuele Orgiu, Chaoying Fu, qui est la première auteure de l’étude, a trouvé un moyen d’utiliser les macrocycles pour dessiner des motifs moléculaires sur la surface d’un matériau.
« Ils sont déposés en solution sur la surface et, lorsque le liquide s’évapore, il ne laisse derrière que les molécules. On peut prévoir comment elles vont s’assembler, mais c’est la nature qui les aligne grâce aux interactions avec les molécules voisines et la surface », explique le professeur Orgiu.
L’étude a été réalisée en collaboration avec Dmitrii F. Perepichka, un professeur au département de chimie à l’Université McGill. Son expertise a permis de comprendre comment certaines molécules pouvaient s’assembler à la surface du graphite.
« C’est un bel exemple d’une approche multidisciplinaire où nous avons combiné nos connaissances en synthèse organique et en science des surfaces, dit-il. Le niveau de contrôle que nous avons pu exercer sur la forme et la structure des molécules synthétisées est tout à fait remarquable. »
D’après le professeur Orgiu, la taille et la forme des macrocycles offrent des perspectives de recherches intéressantes pour modifier davantage les propriétés des matériaux quantiques.
« L’avantage de ces molécules vient des larges pores dans leur structure. Éventuellement, nous pourrions utiliser nos macrocycles comme gabarit et remplir les pores avec des biomolécules qui favoriseraient les propriétés de biodétection de la surface. C’est certainement l’une de nos prochaines étapes pour de futurs projets. »
L’article Surface-Confined Macrocyclization via Dynamic Covalent Chemistry, publié dans le journal ACS Nano, présente les résultats des travaux de recherche réalisés par Chaoying Fu, Jiří Mikšátko, Lea Assies, Vladimír Vrkoslav, Silvia Orlandi, Martin Kalbáč, Petr Kovaříček, Xiaobin Zeng, Boping Zhou, Luca Muccioli, Dmitrii F. Perepichka et Emanuele Orgiu. Ceux-ci ont bénéficié du soutien financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), du Centre québécois sur les matériaux fonctionnels (CQMF), la Czech Science Foundation (GACR) et le National Natural Science Foundation of China. DOI : https://doi.org/10.1021/acsnano.9b07671