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Une nouvelle technique repousse certaines limites de l’imagerie dans l’infrarouge des nanoparticules dopées aux terres rares.
Jinyang Liang professeur à l’INRS, Miao Liu doctorante à l’INRS en science de l’énergie et des matériaux et Fiorenzo Vetrone professeur à l’INRS devant le dispositif SWIR-PLIMASC
Les équipes des professeurs Jinyang Liang et Fiorenzo Vetrone du Centre Énergie Matériaux Télécommunications de l’INRS ont mis au point un nouveau système pour l’imagerie des nanoparticules. Il s’agit d’une technique d’imagerie dans le spectre infrarouge à ondes courtes de haute précision capable de capturer les durées de vie de la photoluminescence des nanoparticules dopées aux terres rares de la microseconde à la milliseconde.
Cette découverte inédite, parue dans la revue Advanced Science, ouvre la voie à des applications prometteuses, en particulier dans les domaines du biomédical et de la sécurité des informations.
Les éléments de terres rares, qui sont des métaux stratégiques, possèdent des propriétés lumineuses uniques qui en font des outils de recherche très attrayants, à l’heure actuelle, dans le monde scientifique. De plus, la durée de vie de la photoluminescence des nanoparticules dopées à ces ions a l’avantage d’être peu affectée par des éléments extérieurs. Par conséquent, sa mesure par imagerie permet d’obtenir des données dont on peut tirer une information précise et très fiable.
Or, bien que ce domaine jouisse d’un essor remarquable, les systèmes optiques jusqu’alors disponibles pour effectuer ce type de mesure n’étaient pas optimaux.
« Les systèmes d’imagerie optiques qui existaient jusqu’à maintenant offraient des possibilités limitées en raison d’une détection inefficace des photons, d’une vitesse d’imagerie limitée et d’une faible sensibilité. »
Professeur Jinyang Liang, spécialiste de l’imagerie ultra-rapide et biophotonique.
À ce jour, la technique la plus courante pour mesurer la durée de vie de la photoluminescence des nanoparticules dopées aux terres rares s’appuyait sur le comptage de photons uniques corrélés en temps.
« Cette méthode nécessite un grand nombre d’excitations répétées au même endroit parce que le détecteur ne peut traiter qu’un nombre limité de photons pour chaque excitation. »
Miao Liu, doctorante en science de l’énergie et des matériaux sous la direction du professeur Liang et du professeur Vetrone et première auteure de l’étude.
Or, les longues durées de vie de la photoluminescence des nanoparticules dopées aux terres rares dans l’infrarouge, de l’ordre de centaines de microsecondes à plusieurs millisecondes, limitent le taux de répétition de l’excitation. Résultat? Le temps de séjour des pixels nécessaire pour construire la courbe de décroissance de l’intensité de la photoluminescence est beaucoup plus long.
Au-delà des limites
Pour répondre à ce défi, les équipes des professeurs Liang et Vetrone ont combiné l’optique par balayage de fentes et une caméra à haute sensibilité. Le dispositif ainsi créé s’appelle SWIR-PLIMASC (SWIR pour short wave infrared et PLIMASC pour photoluminescence lifetime imaging microscopy using an all-optical streak camera). Il permet une cartographie largement améliorée des propriétés optiques de la durée de vie de la photoluminescence dans l’infrarouge à onde courte. Dans le domaine de l’optique, c’est le premier système d’imagerie SWIR à haute sensibilité et à très grande vitesse.
« Il présente plusieurs avantages, fait valoir Miao Liu. D’une part, il répond à une large gamme spectrale de 900 nm à 1700 nm et permet de détecter la photoluminescence à différentes longueurs d’onde et/ou bandes spectrales ».
De plus, ajoute la doctorante, avec l’aide de ce dispositif, les durées de vie de la photoluminescence dans l’infrarouge, de la microseconde à la milliseconde, peuvent être directement capturées en un clic avec une vitesse d’imagerie 1D réglable de 10,3 kHz à 138,9 kHz.
Enfin, l’opération qui attribue les informations temporelles de la photoluminescence à différentes positions spatiales fait en sorte que l’ensemble du processus de décroissance de l’intensité de la photoluminescence 1D peut être enregistré en un clic, sans excitation répétitive. « On gagne du temps, mais avec une sensibilité élevée », résume Miao Liu.
Des applications dans le biomédical et en sécurité
Les travaux menés dans le cadre de cette recherche auront des retombées très concrètes. Dans le domaine biomédical, les avancées rendues possibles par SWIR-PLIMASC pourraient servir dans la lutte contre le cancer, croit le professeur Fiorenzo Vetrone dont l’expertise touche la nanomédecine.
« Comme notre système s’applique à l’imagerie de la durée de vie photoluminescence des ions de terre rare basé sur la température, nous croyons que les données obtenues pourraient, par exemple, aider à détecter de façon encore plus précoce et précise des cellules cancéreuses. Le métabolisme de ces dernières entraînant une augmentation de la température des tissus environnants. »
Professeur Fiorenzo Vetrone, spécialiste en nanoparticules dopées aux terres rares
D’autres applications de ce système novateur concernent le stockage d’information à des niveaux de sécurité rehaussés, plus précisément pour prévenir la falsification de documents et de données. Enfin, en science fondamentale, ces résultats inédits permettront de concevoir et de synthétiser des nanoparticules de terres rares aux propriétés optiques toujours plus attrayantes.
À propos de l’article
Cet article a été coécrit par Miao Liu, Yingming Lai, Miguel Marquez, Fiorenzo Vetrone, et Jinyang Liang. Intitulé Short-wave Infrared Photoluminescence Lifetime Mapping of Rare-Earth Doped Nanoparticles Using All-Optical Streak Imaging, il a été publié dans Advanced Science, le 6 janvier 2024. https://doi.org/10.1002/advs.202305284
Ces travaux de recherche ont été financés par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Programme des chaires de recherche du Canada, la Fondation canadienne pour l’innovation et le ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec, la Société canadienne du cancer, le fonds Nouvelles frontières en recherche du gouvernement du Canada, ainsi que le Fonds de Recherche du Québec–Nature et Technologies et le Fonds de Recherche du Québec –Santé.
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