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17 janvier 2024 | Alexandra Madoyan Trautmann
Mise à jour : 7 mars 2024
Les populations vulnérables sont exposées à davantage de risques dans leur accès aux transports en commun.
Si, pour beaucoup de personnes, la marche jusqu’à la prochaine station de métro ou le prochain arrêt d’autobus semble anodine, il n’en va pas de même pour toutes les populations. Le manque d’accessibilité universelle du territoire et l’insécurité routière lors de traversées de rues peuvent avoir de sérieuses incidences sur les personnes piétonnes vulnérables comme les personnes âgées et les familles avec de jeunes enfants. Il s’agit d’un véritable enjeu en matière de justice environnementale : les groupes sociaux les moins favorisés sont aussi ceux ayant le moins accès à des options saines pour eux-mêmes et pour l’environnement.
C’est ce que démontrent les récents articles publiés par la professeure Marie-Soleil Cloutier, directrice du Centre Urbanisation Culture Société de l’INRS, et par le candidat à la maîtrise en études urbaines Philippe Brodeur-Ouimet. Ces travaux leur ont d’ailleurs valu le prix du meilleur article scientifique du comité piéton à l’occasion du congrès annuel du Transportation Research Board, qui se tenait à Washington du 7 au 11 janvier 2024.
« C’est une très belle consécration de notre recherche menée sur les réalités du terrain. Nos travaux mettent en évidence les vulnérabilités de certaines populations lors de l’accès au transport collectif. Si l’on souhaite que les usagers délaissent la voiture pour des moyens de transport durables, il est indispensable de sécuriser et de démocratiser les axes piétonniers qui mènent aux stations de bus, de train et de métro », souligne la professeure Marie-Soleil Cloutier, experte en sécurité routière.
Ces travaux viennent combler une lacune dans la littérature scientifique sur ce que l’on appelle « le premier et le dernier kilomètre » (first-mile / last mile), soit la perspective d’équité dans les déplacements pour accéder et quitter le réseau de transport collectif.
La chercheuse et son équipe, dans le cadre d’un projet en collaboration avec Trajectoire Québec, mettent les projecteurs sur le concept de marchabilité, c’est-à-dire la capacité d’un environnement urbain à permettre des déplacements faciles et sécuritaires pour les piétons. Cette notion fait partie intégrante de la réflexion en matière d’accès aux transports en commun. Or, plus les trajets sont complexes, plus les enjeux de justice environnementale sont grands.
Le manque d’infrastructures piétonnes adéquates crée aussi de l’insécurité routière pour ces personnes piétonnes vulnérables. En outre, les conditions météorologiques dressent parfois des obstacles insurmontables en raison de l’impossibilité de rouler pour ceux qui ont des aides à la mobilité et des poussettes, ou de la crainte de chuter pour ceux ayant des limites physiologiques comme un problème d’équilibre ou des limitations fonctionnelles.
Ces situations affectent directement l’expérience de l’usagère ou de l’usager avec du stress, de la frustration et un danger pour sa santé et sa sécurité.
Résultat : plusieurs personnes vont préférer rester avec la voiture solo au lieu de changer pour le transport en commun. Et surtout, ces limites d’inaccessibilité condamnent ces groupes vulnérables, parfois dépendants du transport collectif, à limiter leurs déplacements – et par conséquent, les contraignent à l’isolement.
« Si l’on veut diminuer la place de l’automobile en ville, mais aussi améliorer la qualité de vie de certains groupes, la réflexion débute dès l’instant où les piétonnes et piétons quittent leur domicile ou leur lieu de travail », indique Philippe Brodeur-Ouimet. « C’est une question d’équité », conclut-il.