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Sites de consommation supervisée : combler les lacunes de la recherche  

3 juin 2024

Mise à jour : 3 juin 2024

La professeure à l’INRS Carolyn Côté-Lussier lance un projet pilote à Montréal visant à identifier des pistes d’action pour la santé publique

Les sites de consommation supervisée se retrouvent régulièrement au cœur des débats politiques et sociaux. Et si les bénéfices pour les personnes utilisatrices sont bien documentés, les impacts sur les communautés locales sont néanmoins peu étudiés. 

C’est le constat que dresse Carolyn Côté-Lussier, professeure à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), dans une revue de la littérature sur le sujet. Celle-ci a été publiée le mois dernier dans le Canadian Journal of Public Health en collaboration avec le chercheur postdoctoral Paul Rodrigues à l’INRS et également affilié au Centre international de criminologie comparée (CICC) de l’Université de Montréal. 

Carolyn Côté-Lussier professeure en criminologie, psychologie sociale et santé à l’Institut national de la recherche scientifique

« C’est un tout nouveau champ de recherche, ça fait seulement 20 ans au Canada qu’a ouvert le premier site de consommation supervisée à Vancouver »

Carolyn Côté-Lussier, chercheuse spécialisée en criminologie et psychologie sociale et santé.

 Aujourd’hui, selon les données du gouvernement du Canada, on compte 39 sites de consommation supervisée dans tout le pays, qui ont enregistré plus de 4 millions de visites entre 2017 et 2023. 

Or, lorsqu’un nouveau site s’apprête à ouvrir, il connaît souvent une réticence de la part des populations locales. Si ces dernières n’en nient pas les bénéfices, elles soulèvent souvent des craintes pour leur sécurité et, en particulier, celle de leurs enfants. Le problème, explique la chercheuse, est que l’on manque actuellement de données probantes pour rassurer la population et tenter de répondre à ce phénomène de “pas dans ma cour”. 

“Où devrait-on ouvrir un nouveau site ? Quel est le mode de fonctionnement optimal pour les personnes utilisatrices, mais aussi pour les communautés avoisinantes ? Quel est l’impact, en bien ou en mal, sur la vie de quartier ?”, énumère-t-elle. Ce sont des questions qui reviennent souvent dans les débats publics, mais qui sont en réalité peu approfondies dans la littérature scientifique. 

“C’est un vrai enjeu d’équité, de justice sociale”, souligne la chercheuse. “Il faut non seulement agir contre la stigmatisation qui entoure les personnes qui consomment, mais aussi trouver des solutions gagnantes pour la cohabitation à long terme”. 

Carolyn Côté-Lussier lance donc un appel à la communauté scientifique, afin de combler les lacunes de la science à ce sujet. Elle a elle-même soumis une demande de financement pour réaliser un projet autour de trois sites de consommation supervisée à Montréal, afin de sonder la population locale à différentes échelles. 

« En fournissant des données probantes, on espère trouver des pistes d’action pour la santé publique, pour soutenir le fonctionnement des sites actuels et mieux planifier l’ouverture d’autres »

Carolyn Côté-Lussier

Ce projet qui a déjà reçu une subvention de démarrage du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) devrait débuter à l’automne.