- Portée de la recherche
« La portée de la recherche : un partenariat avec… » nous fait découvrir des projets réalisés par les professeurs de l’INRS en partenariat avec des organisations œuvrant au-delà des milieux scientifiques habituels et dont les résultats ont un impact sur la société.
L’équipe de Roberto Morandotti collabore avec la compagnie OptoElectronics Components (OEC) pour aller plus loin en technologie quantique. Photo : Adobe Stock
Conquérir les pouvoirs de la lumière et repousser les limites de l’informatique à un stade jamais vu qui révolutionnera le futur, c’est l’objectif que poursuivent l’équipe de Roberto Morandotti de l’Institut national de recherche scientifique (INRS) en collaboration avec la compagnie OptoElectronics Components (OEC).
Dans les œuvres de science-fiction, la représentation de machines hyper puissantes capables de tâches qui dépassent l’entendement fascinent. Et si la distance entre le monde imaginaire et le monde réel tendait à se réduire?
Les travaux de Roberto Morandotti et de son équipe donnent envie d’y croire. « Développer des idées que personnes n’a encore explorées : voilà ce qui m’anime », témoigne ce chercheur au Centre Matériaux Énergie Télécommunications. Son champ d’expertise le sert bien dans cette vision. Le professeur se spécialise dans la mécanique quantique et la photonique intégrée.
« Ce sont des domaines complexes, mais ils offrent de grandes possibilités pour challenger la technologie. »
Roberto Morandoti, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en photonique intelligente, responsable scientifique du Laboratoire de manipulation ultrarapide de faisceaux lumineux.
Dans la technologie actuelle, l’information voyage par signaux électroniques, indique le professeur. Elle est codée sous forme binaire et ne peut donc prendre que deux états, 0 ou 1. Le bit est l’unité d’information de cette approche. Dans la communication quantique, l’information est transmise par des particules de lumière appelées photons. Son codage, dont l’unité d’information s’appelle qubit, peut prendre les états de 0 et de 1 en même temps. « C’est ce qui permet de traiter infiniment plus de données de manière extrêmement rapide et sécuritaire », explique-t-il.
Les travaux de l’équipe de Roberto Morandotti portent particulièrement sur des appareils qui existent déjà dans le domaine biomédical ou dans les télécommunications.
« L’idée est de rendre ces appareils plus puissants grâce à des composantes adaptées qui fonctionnent selon l’approche quantique tout en nous assurant qu’ils demeurent accessibles pour les utilisateurs. »
Roberto Morandotti
Or, repousser les frontières en termes de recherche à l’aide d’expériences en laboratoire nécessite bien souvent d’utiliser de l’équipement qui n’existe pas encore. « Au fil de nos expérimentations, c’est devenu une évidence, raconte Roberto Morandotti. Nous avions besoin d’un partenaire en mesure de fabriquer l’appareillage de pointe qui nous manquait pour faire avancer nos travaux ». Notamment, le chercheur et son équipe avaient besoin d’un détecteur et compteur de photons sensible et puissant.
C’est auprès de la compagnie OEC qu’ils ont trouvé la solution. « Ils sont les leaders au Canada en matière de technologie quantique », fait valoir le professeur. Le président de la compagnie, Nick Bertone, lui-même physicien, connaissait le professeur Morandotti de réputation. Rapidement, une entente basée sur la confiance et sur les intérêts communs s’établit.
« C’est un chercheur de renom et la perspective de collaborer avec lui et son équipe était stimulante. Tout comme celle de développer de nouveaux produits en lien avec nos spécialités respectives. »
Nick Bertone, président du partenaire OptoElectronics Components
Depuis 2014, les équipes du professeur Morandotti et de Nick Bertone collaborent donc sur la base d’échanges réguliers. Les réalisations issues de la mise en commun de leurs expertises sont pour la plupart interreliées. Parmi elles figure le premier système servant à stabiliser les faisceaux lumineux produit par un petit dispositif appelé interféromètre. Son développement a rendu possible la création d’une puce révolutionnaire. Cette microstructure et ses composantes fonctionnent selon une méthode ingénieuse et très novatrice qui permet de générer des photons quantiques, et donc des qubits, à un taux jamais observé auparavant. « De plus, elle s’adapte parfaitement aux systèmes numériques actuels », précise Roberto Morandotti. Il s’agit d’une percée majeure qui pourrait notamment multiplier les possibilités d’utilisation de l’intelligence artificielle.
Le rayonnement de ces avancées scientifiques est tel qu’elles ont été publiées dans de nombreuses publications prestigieuses à l’échelle de la planète.
Plus encore, les réalisations issues du partenariat entre les équipes de Roberto Morandotti et de OEC ont fait l’objet d’une reconnaissance importante en 2019, soit le Prix Synergie pour l’innovation. Remis par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, il souligne leur caractère remarquable qui place le Canada à l’avant-garde de l’ère quantique.
Pour leur part, les deux collaborateurs sont enchantés du succès de cette expérience qui se poursuit. « C’est un échange qui va dans les deux sens, estime Nick Bertone. Nous développons de nouveaux produits, nous les améliorons ensemble. Nous qui sommes à l’affût des besoins du marché, nous pouvons aussi y répondre avec ces nouveaux équipements. »
« Nos interactions nous permettent, à mon équipe et à moi, de pousser nos recherches et notre expérimentation toujours plus loin en ayant une meilleure idée des besoins actuels et futurs de l’industrie », poursuit le professeur Morandotti.
En outre, cette relation gagnante a permis de part et d’autre d’établir un vaste et riche réseau de contacts.
À ce jour, le désir de faire avancer le domaine les technologies quantiques habitent autant les partenaires. Dans le cadre de leurs travaux, le professeur Morandotti et son équipe se penchent sur la possibilité d’isoler un photon et de le rendre plus efficace et rapide. Cet exercice, s’il est maîtrisé amèneraient les chercheurs vers d’autres avenues prometteuses, parmi lesquelles la construction du fameux ordinateur quantique.
« Des ordinateurs ultrarapides, dont les capacités dépassent tout ce qu’on a connu jusqu’à maintenant, c’est le Saint-Graal des scientifiques. Nous n’y sommes pas encore, mais nous créons les petits blocs qui, placés ensemble, nous amèneront peut-être à y parvenir. »
Nick Bertone
Au-delà de ce but ultime, les deux hommes sont d’accord. Ce qui importe, c’est que les découvertes rendues possibles par leur concours soient utiles à la communauté scientifique et à l’industrie. Et surtout que toute la société puisse en bénéficier.