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Évaluer le potentiel géothermique à l’aide d’outils précieux

21 mars 2023 | Sophie Laberge

Mise à jour : 14 juin 2024

Grâce à des logiciels ultra-performants, l’étudiante Fiona Chapman réalise un projet d’études d’envergure au Yukon.

Le projet d’études de la doctorante à l’INRS Fiona Chapman permet d’évaluer le potentiel géothermique dans le sud-ouest du Yukon

Depuis quelques mois, Fiona Chapman se consacre à un projet d’études stimulant dans le sud-ouest du Yukon, dans le nord du Canada. Pour faire l’évaluation du potentiel géothermique dans cette région, elle utilise des logiciels de haute performance. Grâce au soutien de l’entreprise Petroleum Experts, elle est sur le point d’avoir accès à un ensemble de logiciels de modélisation d’une valeur impressionnante de 4 549 535,83 livres sterling (soit plus de 7 millions de dollars canadiens). Cette suite d’outils aidera Fiona à quantifier le potentiel géothermique de la région et lui permettra d’intégrer les résultats obtenus sur le terrain dans sa modélisation numérique.

Ce travail de terrain, c’est dans la région de Duke River, dans le sud-ouest du Yukon, que Fiona Chapman l’a effectué. Sur le territoire de la Première nation Kluane, qui réside à Burwash Landing, elle a mené ses recherches sous la supervision des professeurs Jasmin Raymond (expert en énergie géothermique) et Renaud Soucy La Roche (expert en géologie structurale).

De gauche à droite : Renaud Soucy La Roche, codirecteur de recherche et professeur à l’INRS, Mafalda Miranda, stagiaire postdoctorale à l’INRS, et Fiona Chapman ,étudiante au doctorat à l’INRS.

Nous nous sommes entretenus avec cette doctorante en sciences de la Terre à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), pour en savoir plus sur la suite IPM (Integrated Production Modelling) et sur la manière dont elle compte utiliser les programmes MOVE et REVEAL dans le cadre de son projet.

Pourquoi était-il important de pouvoir travailler avec des logiciels de cette envergure ?

Lorsque nous évaluons le potentiel géothermique profond d’une zone, nous nous considérons trois principaux paramètres : la chaleur, la perméabilité et la disponibilité des fluides. La suite d’outils IPM servira à évaluer principalement la perméabilité de la zone géographique étudiée. Quant au logiciel MOVE, il permettra de créer des réseaux de fractures discrètes (discrete fracture network).

L’outil MOVE me permettra d’intégrer les données sur les fractures que nous avons recueillies sur le terrain – y compris l’ouverture, la longueur et l’orientation des fractures –  afin de construire un modèle numérique représentatif des fractures (réseau de fractures discrètes). À partir de là, MOVE me permettra de calculer la conductivité hydraulique de chaque réseau de fractures discrètes. Le développement d’un tel réseau et l’estimation de la conductivité hydraulique constituent une étape essentielle dans l’élaboration d’un modèle d’écoulement régional et, en fin de compte, dans l’estimation du potentiel géothermique autour de Burwash Landing.

Quel est l’intérêt d’étudier l’énergie géothermique dans un contexte national de transition énergétique ?

Dans les communautés éloignées du territoire du Yukon, le gaz naturel et le diesel sont utilisés pour répondre à la plupart des besoins énergétiques, y compris le chauffage des résidences. Cette source d’énergie est fiable, mais ne constitue pas une solution de rechange écoresponsable sur le plan économique et environnemental pour ces communautés situées hors des réseaux hydroélectriques. Contrairement à d’autres sources d’énergie renouvelables, comme l’énergie solaire ou éolienne, qui sont intermittentes, l’énergie géothermique pourrait fournir une chaleur ou une production d’électricité constante. Cette ressource peut éventuellement permettre de réduire la dépendance des collectivités à l’égard du diesel.

Quant à moi, je m’intéresse surtout aux systèmes géothermiques profonds à boucle ouverte, qui prennent l’eau chaude directement d’un réservoir d’eau souterraine. Selon la température de l’eau et du système qui la transporte, cette chaleur peut être utilisée indirectement pour produire de l’électricité, ou encore directement pour chauffer des bâtiments. Dans les deux cas, une fois que l’eau est utilisée, elle subit un refroidissement avant d’être réinjectée dans le même réservoir par un autre puits. En raison des interactions directes avec l’eau des réservoirs, le potentiel de ces systèmes dépend de la perméabilité et de la conductivité hydraulique des réservoirs ciblés.

Le logiciel MOVE me permet d’en évaluer les propriétés, à partir des mesures de fractures à la surface.

Sur le terrain, au Yukon, comment se passe la collaboration avec les communautés locales ?  

Burwash Landing est une petite localité d’environ 80 habitants située le long de la route de l’Alaska. Il était très important pour nous de tenir la population informée de l’avancement du projet. Après tout, nous étions des invités sur leurs terres. Au cours de l’été 2022, j’ai eu l’occasion de travailler avec Jason MacDonald, responsable des travaux publics de Burwash Landing. Il nous a aidés à accéder aux puits d’eau chaude profonds de la communauté. Cette relation s’est avérée inestimable et a vraiment permis d’évaluer l’impact social de ce type de projet.

Photo de terrain au Yukon.

Plus tard au cours de l’automne, j’ai préparé une affiche résumant mon travail et mes conclusions. Il a été présenté par Leyla Wetson, géologue à la Commission géologique du Yukon, lors de la journée portes ouvertes de la station de recherche du lac Kluane, destinée aux scientifiques et aux membres de la communauté. Travailler avec ces organismes et les membres de la communauté de Burwash Landing a été une expérience révélatrice.

Dès l’automne prochain, j’espère pouvoir présenter les résultats des modèles préliminaires que j’aurai élaborés avec ces outils fournis par Petroleum Experts.