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Géraldine Delbès et Melany Juárez parmi les ambassadrices de l’exposition « Les chercheuses en BD ».
Photo de gauche à droite : Géraldine Delbès, chercheuse qui se spécialise en toxicologie de la reproduction et Melany Juárez, étudiante au doctorat dans le laboratoire de la professeure Isabelle Plante.
La professeure Géraldine Delbès et la doctorante Melany Juárez figurent parmi les 21 chercheuses ambassadrices dont les parcours ont été vulgarisés par des bédéistes dans le cadre de l’exposition itinérante « Les chercheuses en BD ». Produite par le Festival BD Montréal, cette initiative du Consulat général de France à Québec et des Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT) permet la mise en valeur des parcours et des travaux de femmes dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM). Issu d’une collaboration franco-québécoise, ce projet scientifique permet de souligner la réussite des chercheuses aux parcours variés et inspirants, en racontant l’histoire de leur carrière sous un angle moins exploré.
Les deux scientifiques du Centre Armand Frappier Santé Biotechnologie de l’INRS partagent avec nous leur expérience lors de la réalisation de ce projet et leur vision sur l’importance de vulgariser la science pour sensibiliser le public, mais aussi sur le travail des femmes en recherche.
G.D.: Ces planches de BD retracent mon parcours de vie personnelle et professionnelle, de mon enfance jusqu’à ma carrière de professeure. On y découvre aussi quelques-uns de mes projets de recherche, notamment sur les effets de l’environnement sur la fertilité masculine mais aussi l’héritage épigénétique, c’est-à-dire l’influence de l’environnement sur les gènes transmis à la descendance.
M.J.: La BD illustre mes travaux de thèse. Je cherche à comprendre comme l’environnement d’une femme enceinte peut avoir des conséquences sur la vie adulte du bébé. Durant la grossesse, les femmes peuvent être exposées à des composants environnementaux (perturbateurs endocriniens, produits chimiques, pollution) qui peuvent interférer avec la communication cellulaire dans notre corps. Cela peut causer des problèmes sur le système reproducteur ou même conduire au développement du cancer du sein.
G.D.: Au début, l’expérience était un peu déstabilisante. Mais ça a été une belle rencontre avec la bédéiste Charlotte Melly. C’est une artiste engagée et sensible, avec qui j’ai découvert beaucoup de points communs et un intérêt mutuel à comprendre nos parcours et professions respectifs. Nous avons même décidé de poursuivre un projetde vulgarisation scientifique ensemble, pour parler plus en profondeur de l’effet des perturbateurs endocriniens sur la santé.
M.J.: La bédéiste Catherine Bard a fait un superbe travail pendant le processus de création. Puisqu’elle a elle-même une formation en biologie, les échanges d’idées et la transmission de savoirs se sont faits facilement. Partager la science à travers l’art est un processus enrichissant. J’ai été très touchée de voir le produit final en BD, fruit de nos discussions.
G.D.: La bande dessinée permet de rejoindre et d’informer un plus large public sur certains enjeux de santé environnementale. Il permet aussi de démystifier la présence des femmes en sciences, les parcours non linéaires ou encore la diversité dans ce milieu, pour faire tomber les barrières, en particulier chez les jeunes.
M.J.: En tant que chercheuse, mon travail ne s’arrête pas au laboratoire ou ne se limite pas à l’écriture d’un article scientifique. La science est faite pour être partagée et divulguée au grand public. On a déjà vécu les effets de l’infodémie avec son lot de fausses nouvelles pendant la pandémie de la COVID-19. En tant que scientifique, il est de notre devoir de nous adapter pour mieux diffuser notre recherche. Que ce soit les livres, les BD, les vidéos, la balado, ces supports nous offrent la possibilité de toucher un public plus diversifié.
G.D.: Même s’il y a de plus en plus de femmes en science, il y a encore trop peu de femmes professeures. De plus les mythes persistent selon lesquels certains domaines ne sont réservés qu’aux hommes. Il faut continuer à déconstruire les stéréotypes de genre et bâtir, ensemble, un milieu de recherche et de formation plus inclusif.
M.J.: Malheureusement nous sommes dans un système qui manque d’équité, où l’accès à l’éducation est toujours et encore plus difficile pour les femmes, en particulier dans certains domaines. Les STIM en sont un bon exemple. Parler de l’expérience des femmes en science, et sur des supports différents, offre l’occasion aux filles, dès le plus jeune âge, de découvrir des modèles inspirants et de commencer ou poursuivre une carrière scientifique.
G.D. : Tout à fait, puisque c’est un système qui est bâti sur des critères peu compatibles à la différence et propres à ceux qui l’ont créé.
M.J.: Oui, absolument. Malheureusement on a trop normalisé les stéréotypes et c’est parfois compliqué d’identifier la discrimination par rapport au genre. Il reste encore du travail à faire pour créer des occasions plus équitables et y permettre le développement professionnel des femmes.
Inaugurée à l’occasion de la fête de la Science, cette exposition itinérante circulera dans les universités participantes et dans le réseau culturel québécois durant les prochains mois. Elle est accessible au public jusqu’au 16 janvier 2024, à l’Université de Montréal (2e étage du Pavillon 3200, Jean-Brillant).