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Une équipe de recherche québécoise a réussi à synthétiser des points quantiques de carbone à partir de résidus brassicoles.
Depuis quelques années, la drêche, ce résidu de céréales issu des brasseries, est revalorisée dans l’alimentation animale. Dorénavant, cette matière pourrait également trouver preneur en nanotechnologies ! L’équipe du professeur Federico Rosei de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) a montré que les restes brassicoles peuvent servir de source de carbone pour synthétiser des points quantiques. Les travaux, réalisés en collaboration avec Claudiane Ouellet-Plamondon, professeure à l’École de technologie supérieure (ÉTS), ont été publiés dans la revue RSC Advances de la Royal Society of Chemistry.
Souvent considérés comme des « atomes artificiels », les points quantiques sont utilisés dans la transmission de la lumière. Avec une foule de propriétés physicochimiques intéressantes, ce type de nanotechnologies a été utilisé avec succès comme senseur en biomédecine ou comme DEL dans des écrans de nouvelle génération. Mais il y a un hic. En effet, les points quantiques actuels sont produits à base de métaux lourds et toxiques, comme le cadmium. Le carbone est une solution de remplacement intéressante, tant par sa biocompatibilité que par son accessibilité.
Le choix des résidus brassicoles comme matériel source est venu de Daniele Benetti, postdoctorant à l’INRS, et Aurel Thibaut Nkeumaleu, étudiant à la maitrise à l’ÉTS, qui ont mené les travaux. À la base, ils voulaient réaliser des expériences variées à partir de matières accessibles. C’est ainsi que les scientifiques en sont venus à collaborer avec la microbrasserie Brasseur de Montréal pour obtenir ses résidus céréaliers.
« L’utilisation de la drêche met en évidence une approche écoresponsable de la gestion des déchets et une matière première de rechange pour la synthèse des points quantiques de carbone, le tout dans une perspective d’économie circulaire. »
Federico Rosei
L’avantage d’utiliser des résidus brassicoles comme source de points quantiques de carbone est qu’ils sont naturellement dopés d’azote et de phosphore. Cela évite donc l’usage de produits chimiques purs.
« C’était très amusant comme recherche, d’illuminer ce que nous pouvons faire avec les sous-produits de la production de bière », rapporte Claudiane Ouellet-Plamondon, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les matériaux de construction multifonctionnels durables à l’ÉTS. « Par ailleurs, l’ÉTS se situe sur le site de l’ancienne brasserie Dow, l’une des principales brasseries au Québec jusque dans les années 1960. Il y a donc un lien historique et patrimonial avec ces travaux. »
En plus d’utiliser de la matière biosourcée, l’équipe de recherche a voulu montrer qu’il était possible de produire des points quantiques de carbone avec des moyens communs. Elle a donc utilisé un four à micro-ondes domestique pour carboniser la drêche, obtenant ainsi une poudre noire. Celle-ci a ensuite été mélangée avec de l’eau distillée et remise au four à micro-ondes. Un passage dans la centrifugeuse et des étapes de filtration avancée ont ensuite permis d’obtenir les points quantiques. Le produit fini est capable de détecter et de quantifier les métaux lourds, de même que les autres contaminants qui affectent la qualité de l’eau, de l’environnement et de la santé.
Les prochaines étapes consisteront à caractériser ces points quantiques de carbone provenant de résidus brassicoles, au-delà de la preuve de concept. L’équipe de recherche est convaincue que ces nanotechnologies ont le potentiel de devenir des capteurs de détection sophistiqués pour différentes solutions aqueuses, et ce, même dans les cellules vivantes.
L’article « Brewery spent grain derived carbon dots for metal sensing », par Aurel Thibaut Nkeumaleu, Daniele Benetti, Imane Haddadou, Michael Di Mare, Claudiane Ouellet-Plamondon et Federico Rosei, a été publié le 14 avril 2022 dans la revue RSC Advances de la Royal Society of Chemistry. L’étude a reçu un soutien financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), du Centre québécois sur les matériaux fonctionnels (CQMF) et des Chaires de recherche du Canada.
Le professeur Federico Rosei, expert en nanotechnologie, est lauréat du prix « Gentile da Fabriano », dans la catégorie « Science, Santé et Environnement ». Ce prix lui est décerné par la ville de Fabriano, en Italie centrale, pour ses travaux de recherche innovants aux retombées internationales.