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27 avril 2022 | Audrey-Maude Vézina
Mise à jour : 5 mai 2023
Des travaux de terrain sur la Côte-Nord retracent les effets du barrage Manic-5 depuis sa construction sur le lac Manicouagan.
Armée de longs tubes de PVC, l’équipe récolte une colonne de sédiments dans le réservoir Manicouagan.
Un véritable succès ! C’est ainsi que le professeur Pierre Francus de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) qualifie une récente expédition à Manicouagan, sur la Côte-Nord. Pendant une quinzaine de jours, son équipe conduite par Léo Chassiot, professeur associé à l’INRS, a mené une opération de carottage. Armée de longs tubes de PVC, l’équipe a récolté une vingtaine de colonnes de sédiments dans le réservoir Manicouagan, profond de 400 m et long de 70 km. Tout un défi !
Ces archives sédimentaires serviront à retracer l’histoire environnementale de la région, avec une attention particulière à l’incidence de la construction du barrage Manic-5. En effet, ce dernier a levé le niveau d’eau du lac d’environ 140 m.
« Nous allons pouvoir déterminer les effets qu’a eus l’infrastructure sur la santé du lac, grâce aux propriétés changeantes des sédiments qui se sont déposés au fil du temps. »
Léo Chassiot, également professionnel de recherche à l’Université Laval.
L’équipe analysera, entre autres, l’évolution des dépôts sédimentaires avant et après le barrage, la qualité et la quantité de matière organique, des traceurs du taux d’oxygénation et la présence de métaux.
Les chercheurs ont réussi à récolter des échantillons sur la quasi-totalité des sites choisis en amont. « Dans ma carrière, je n’ai jamais connu une expédition de terrain avec un aussi haut taux de réussite. Habituellement, on est extrêmement satisfait si on fait la moitié des sites. Ici, c’est exceptionnel ! », rapporte le professeur Francus.
La réussite du projet réside dans la participation de la communauté innue de Pessamit, qui a vu son territoire ancestral inondé avec la mise en place du réservoir. En effet, le Conseil des Innus de Pessamit gère la station Uapishka, en collaboration avec la Réserve mondiale de la biosphère Manicouagan-Uapishka. Cette infrastructure est essentielle au bon déroulement des opérations de recherche sur le terrain, et l’équipe est heureuse d’avoir été si bien guidée.
Durant l’expédition, Léo Chassiot était accompagné de l’agent de recherche Arnaud De Coninck, membre de l’équipe du professeur Francus, et de Samuel Couture, étudiant à la maîtrise à l’Université Laval. Les trois chercheurs ont pu compter sur le soutien d’Anthony Bacon, membre de la communauté Pessamit qui travaille à la station Uapishka.
« La contribution d’Anthony Bacon à cette mission en fait aussi son succès. Nous avons passé un excellent séjour, souligne Léo Chassiot. Nous avons eu de très beaux échanges; il était curieux de comprendre pourquoi et comment nous récoltions des sédiments, sur les aspects tant techniques que scientifiques. Grâce à lui, nous nous sommes sortis de plusieurs situations complexes. Et nous avons beaucoup appris sur les Pessamiulnuat, la culture innue et les enjeux actuels de développement du territoire. »
« C’est une région qui demeure sous-étudiée par rapport à d’autres. Or, elle possède un écosystème particulier avec les monts Groulx – aussi appelés monts Uapishka en innu, qui signifie “sommets rocheux toujours enneigés” – qui surplombent le réservoir. Elle présente des enjeux tant sur le plan de la science fondamentale qu’en matière de développement de la recherche en collaboration avec les Premières Nations », ajoute-t-il.
Le projet est financé par l’Institut nordique du Québec (INQ) et Sentinelle Nord. Il profite des infrastructures de recherche de pointe de l’INRS, situées dans le Laboratoire multidisciplinaire de tomodensitométrie pour les ressources naturelles et le génie civil et le Laboratoire de géochimie, imagerie et radiographie des sédiments.
Le professeur Francus recrute actuellement une étudiante ou un étudiant à la maîtrise pour l’analyse des carottes de sédiments récoltées dans le réservoir de la centrale de Manic-5.
Analyse de l’effet de l’ennoiement du lac Manicouagan par le barrage Daniel-Johnson sur la sédimentation lacustre