L’avenir de l’agriculture se traduit par l’adaptation des pratiques agricoles aux besoins spécifiques du sol et des plantes. L’agriculture de précision permet de répondre à ce besoin de gestion des intrants agricoles.
L’équipe du professeur Karem Chokmani, expert en télédétection, contribue au développement de cette stratégie de gestion qui prend en compte la variabilité spatiale intrinsèque à un champ agricole. « Puisque les champs ne sont pas homogènes en termes de texture, de composition et de relief, nous les divisons en différentes zones dites d’aménagement. Ces sous-sections peuvent alors être considérées comme étant homogènes, ce qui implique plus de précisions dans la gestion agricole », note le professeur Chokmani.
Afin de délimiter les sous-parcelles, les étudiants Miguel Felipe Vargas Gutierrez et Abdelkarim Lajili ont testé différentes technologies pour connaître les caractéristiques du sol sans avoir à l’échantillonner, avec des méthodes basées sur les propriétés électriques des sols. « Nous pouvons connaître la composition du sol par l’entremise deson comportement électrique; l’argile est un meilleur conducteur que le sable, par exemple. La variation de la résistance au passage de l’électricité permet ainsi de délimiter le champ en zones différentes », explique le professeur Chokmani. Une autre méthode de détection indirecte est le radar de pénétration du sol (GPR – Ground penetration radar). Cette technique géophysique envoie un signal vers le sol pour en connaître les caractéristiques telles que la profondeur.
La bonne dose au bon moment
Les zones d’aménagement peuvent également être identifiées à l’aide de l’imagerie acquise par drone, une méthode rapide et peu coûteuse.
Cette technique sert, entre autres, à moduler les processus de fertilisation et d’irrigation, tous deux dépendant des propriétés physico-chimiques du sol.
Hachem Agili, étudiant au doctorat, travaille justement sur la gestion intra-saisonnière de la fertilisation azotée de la culture de la pomme de terre. « Ce type de culture demande beaucoup d’engrais pour avoir un bon rendement, mais l’azote est un composé très mobile. Environ la moitié de ce qu’on met est lessivé, par la pluie par exemple, et peut éventuellement rejoindre la nappe phréatique ou les cours d’eau alentour, rapporte le professeur Chokmani. En fractionnant la dose ajoutée au sol, dans le temps et dans l’espace, et selon le besoin de la plante qu’on quantifie à l’aide de l’imagerie, on évite ce problème. »
La doctorante Sarah Cristina Araujo Martins, quant à elle, se sert des drones pour piloter l’irrigation des champs, particulièrement en contexte de changement climatique. « On ne peut pas attendre que la plante se flétrisse pour l’arroser, car elle aura déjà subi un stress. On doit donc connaître la quantité qui se trouve déjà dans le sol, qui, dans ce contexte, agit comme un réservoir », souligne le professeur. Plutôt que de brancher une sonde dans la terre pour détecter l’humidité, on se sert des plantes. Ce sont des sondes naturelles pour nous fournir des renseignements sur la quantité d’eau du sol, à travers leurs variations de température. « Lorsqu’elles commencent à manquer d’eau, elles réduisent leur transpiration et leur température augmente. C’est ce changement de température qui peut être détecté avec une caméra infrarouge thermique, embarquée sur le drone. »