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L’érosion, entre terre et mer

Publié par Audrey-Maude Vézina

4 décembre 2020

( Mise à jour : 14 juin 2024 )

Lorsque la terre et la mer se rencontrent, l’érosion des berges survient. Les professeurs Damien Pham Van Bang et Jacob Stolle, tous deux spécialistes en hydrodynamique côtière, s’intéressent à ce problème qui affecte de nombreux lieux partout sur la planète. « Nous sommes un peu dans un « no man’s land ». Les terriens négligent l’eau et les marins négligent la terre, plaisante le professeur Pham Van Bang. Les deux sont pourtant étroitement reliés. »

Baie-Saint-Paul, dans Charlevoix. Photo : Marc Richer-Laflèche

Leur recherche porte principalement sur la région de Baie-Saint-Paul, dans Charlevoix. Selon le professeur Pham Van Bang, il s’agit d’un point chaud en matière de risque naturel. « De nombreux processus hydrodynamiques y prennent place avec les marées, le courant des vagues et la rivière du gouffre qui peut provoquer des glissements de terrain. Avec l’ancien site météoritique, on y trouve également de l’activité sismique », souligne Jacob Stolle, professeur à l’INRS depuis un peu plus d’un an. « Entre L’Isle-aux-Coudres et Baie-Saint-Paul se trouve le chenal de navigation principal où passent tous les bateaux de marchandise. Les vagues engendrées par les navires ajoutent à l’érosion », ajoute le professeur Pham Van Bang.


Baie-Saint-Paul, Québec. Photo : Marc Richer-Laflèche

Malgré tous ces enjeux, très peu de données sont actuellement disponibles pour la région. « Près de 80 % de notre travail actuel porte sur la documentation et l’observation. Nous travaillons en collaboration avec la municipalité afin d’anticiper les problèmes pour mieux réagir. Cette phase de collecte est très importante, puisque nous avons besoin de données pour nourrir un outil de prédiction de l’érosion. » Ce travail est réalisé en collaboration avec Didier Perret, expert en sols, en glissement de terrain et en sismicité à la Commission géologique du Canada, et le professeur de l’INRS Marc Richer-Laflèche, expert en géophysique et en tomographie.


Des solutions inspirées par la nature

Pour prévenir l’érosion, des techniques de remédiation, comme le rechargement de la plage, ou des solutions de protection traditionnelles, telles que l’enrochement ou les barrages, sont possibles. Mais l’équipe de recherche envisage plutôt des solutions innovantes, basées sur la nature. Par exemple, certaines plantes peuvent amortir les vagues et diminuer leur capacité d’éroder la côte, en plus de stabiliser les sols. « Nous allons effectuer des tests sur ces techniques végétales afin d’examiner les bienfaits de la végétation et de la structure des racines. Nous sommes un peu en retard au Québec quant à ces solutions vertes, mais ça nous permet de travailler à partir des expériences réalisées ailleurs et d’éviter des erreurs », affirme Damien Pham Van Bang.

Pour caractériser l’amortissement des vagues par technique végétale, l’équipe collabore avec l’Université d’Ottawa pour la modélisation physique et les essais en grand canal à vagues, et avec l’Université de Brock pour l’aspect de la végétation et de sa protection contre l’érosion. « À l’origine, les tests devaient être réalisés au canal expérimental de l’Université d’Ottawa, mais avec la pandémie, nous avons choisi de mener l’expérience au canal de l’INRS, situé à Québec. Le professeur Stolle travaille donc avec l’Université d’Ottawa pour redimensionner les essais à l’échelle de nos installations. L’Université de Brock apportera son aide quant à la représentation du comportement naturel de la végétation en laboratoire », explique le professeur Pham Van Bang.  

Le projet de recherche, financé par le Réseau Québec maritime (RQM), le Marine Environmental Observation, Prediction and Response Network (MEOPAR) et la Ville de Baie-Saint-Paul tient aussi compte de l’aspect sociopsychologique du projet, soit l’analyse de la perception des risques et les moyens de communication utilisés, à l’occasion d’une collaboration avec l’Université de Montréal.