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Le professeur Taha Ouarda collabore avec une équipe internationale pour étudier et prédire l’influence humaine sur le climat.
Une étude internationale montre que le risque de vagues de chaleur et d’épisodes de sécheresse simultanés devrait décupler à travers le territoire indien d’ici 2100.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) appelle à des efforts urgents d’adaptation et d’atténuation face à la crise climatique dans son dernier rapport. Une équipe de recherche internationale s’est penchée sur l’influence de l’activité humaine sur les changements climatiques, principalement sur l’évolution des vagues de chaleur en Inde depuis le début du 20e siècle. Dans un article publié récemment dans la revue Scientific Reports, leurs conclusions montrent que le risque de vagues de chaleur et d’épisodes de sécheresse simultanés devrait décupler à travers le territoire indien d’ici 2100.
« Il faut agir et arrêter de dire que les augmentations observées ou projetées ne sont pas si sérieuses : “1 °C ou 1,5 °C, ça ne va pas ruiner la Terre…”. On est en train de perdre le contrôle, si ce n’est pas déjà fait. »
Taha Ouarda, professeur à l’INRS et coauteur de l’étude.
Le professeur Ouarda a collaboré avec des scientifiques du Laboratoire national de recherche atmosphérique (Inde) et de l’Université de Californie
L’équipe a cherché à comprendre l’influence que pouvaient avoir les causes naturelles, dont l’énergie solaire ou l’activité volcanique, et les causes humaines telles que les gaz à effet de serre, le déboisement ou l’occupation des sols. Pour cela, elle s’est servie de l’indice de magnitude des vagues de chaleur quotidien (HWMId), qui classe ces dernières selon leur intensité.
D’ici la fin du présent siècle, les résultats montrent que le risque associé à ces vagues de chaleur pourrait être multiplié par dix dans certaines régions de l’Inde. Des conséquences non négligeables sachant que l’Inde est le deuxième pays le plus peuplé au monde, avec près de 1,4 milliard d’habitants.
En 2015, l’Inde a été gravement touchée par des vagues de chaleur attribuées aux activités anthropiques qui ont causé des milliers de décès. Les secteurs tels que l’environnement, la santé, l’agriculture et l’énergie seront fortement touchés si des mesures d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques ne sont pas mises en place lors des prochaines vagues de chaleur.
« Le territoire indien est une excellente plateforme de recherche, car il est plus grand que l’Europe de l’Ouest, et il est représentatif de plusieurs types de climats qu’on trouve sur Terre », souligne le chercheur, spécialiste des modèles statistiques en environnement.
Les données observées ont montré une forte augmentation des vagues de chaleur au cours des dernières décennies, mais les scientifiques croient que plus de 70 % de la superficie de l’Inde subira les effets de vagues de chaleur intense avant la fin du siècle.
Les scientifiques ont également étudié le lien entre les vagues de chaleur et les épisodes de sécheresse, montrant une corrélation directe entre celles-ci.
Ce scénario concerne aussi l’Occident. Taha Ouarda considère qu’il n’y a pas assez d’efforts mis sur le plan du développement urbain et de la construction des infrastructures, au Canada.
« Nous avons un faux sentiment de sécurité au Québec, et dans le reste du Canada, car nous ne vivons pas dans un climat chaud. Pourtant, nous sommes moins préparés et plus vulnérables que d’autres populations ».
Taha Ouarda, professeur à l’INRS
Selon lui, il faut investir davantage dans nos infrastructures pour qu’elles soient plus durables d’un point de vue environnemental.
« Travailler sur l’attribution (les causes) des changements climatiques, c’est assumer sa responsabilité en matière de lutte contre la crise climatique. Cela force les décideurs publics et les politiciens à prendre des mesures en conséquence », conclut le professeur Ouarda.
Kishore, P., Basha, G., Venkat Ratnam, M. et al. Anthropogenic influence on the changing risk of heat waves over India. Sci Rep 12, 3337 (2022). https://doi.org/10.1038/s41598-022-07373-3. Ces travaux de recherche ont été financés par le Laboratoire national de recherche atmosphérique (NARL), en Inde.