- Ma recherche en série
Le défi de la recherche fondamentale est de trouver des réponses aux phénomènes naturels qui nous entourent.
Pour moi, la recherche fondamentale est aussi le moyen d’élargir les connaissances scientifiques. Je m’intéressais particulièrement à la microbiologie et à la biologie moléculaire, une branche des sciences de la vie qui concerne, entre autres, la synthèse et la régulation métabolique des macromolécules. Curieuse de nature, cela semblait être la voie idéale pour poursuivre mon parcours universitaire.
Après un baccalauréat en biochimie, j’ai décidé d’entreprendre une maîtrise en microbiologie appliquée à l’INRS, au sein du laboratoire du professeur Jonathan Perreault, expert de la régulation des gènes par des ARN non codants chez les bactéries.
Avec le développement de certains vaccins contre la COVID-19, le grand public entend davantage parler des ARN. On fait souvent référence à sa fonction « classique » d’intermédiaire entre l’ADN et les protéines. En fait, il est régulièrement comparé à une recette qui permet de synthétiser les protéines dont le corps a besoin.
Dans le cas de la COVID-19, le vaccin à ARN synthétise la protéine S du coronavirus et prépare la défense immunitaire en cas d’une véritable attaque du virus. Mais saviez-vous que certains ARN ne suivaient aucune recette ? Autrement dit, ils ne possèdent aucune information pour la synthèse de protéines. Ces ARN non codants sont présents tant chez l’être humain que chez les bactéries.
Ces dernières en font toutefois un meilleur usage que l’espèce humaine, principalement sur le plan du métabolisme.
« Nous avons beaucoup à envier aux microorganismes, particulièrement aux bactéries, puisque ces cellules relativement simples peuvent réguler leur métabolisme afin d’être beaucoup plus économes en énergie. »
Quetia Joseph, diplômée de la maîtrise en microbiologie appliquée
En effet, les bactéries possèdent des « interrupteurs » de gènes, appelés riboswitchs, qui agissent comme des senseurs leur permettant de s’adapter à leur environnement. Une bactérie peut, par exemple, inhiber momentanément un gène dont elle n’aurait plus besoin. Elle économise ainsi son énergie jusqu’au moment où elle devra s’ajuster à un nouveau changement dans son environnement.
Il existe plusieurs types de ces interrupteurs. Mes recherches concernaient les riboswitchs guanidine, qui portent le nom de la molécule qu’ils détectent. Pour l’instant, on sait encore peu de choses à propos de la biologie de la guanidine. Les travaux sur le sujet ont tout de même démontré qu’elle est produite par le métabolisme de certaines bactéries et qu’elle devient toxique lorsqu’elle dépasse un certain niveau.
En cas de surplus, le riboswitch activera un gène appelé sugE. Celui-ci lui permettra d’expulser la guanidine hors de la cellule afin de rétablir une concentration normale. Ce qui est intéressant, c’est que le sugE fait partie d’une classe de gènes appelés small multidrug resistance genes. Lorsqu’il est activé, ce gène permet à la bactérie d’expulser des inhibiteurs, comme des antibiotiques, qui seraient dangereux pour sa survie.
L’association de riboswitchs guanidine à plusieurs gènes de résistance comme sugE suggère l’implication de ces interrupteurs dans la résistance aux antibiotiques.
« Le but de ma recherche était donc d’identifier de nouvelles classes de riboswitchs, mais également de comprendre leur implication potentielle dans la résistance aux antibiotiques. »
Quetia Joseph
Mon parcours m’a permis de creuser un peu plus un champ d’expertise qui m’intéresse, tout en contribuant aux avancées dans ce domaine. La maîtrise en microbiologie m’a également donné l’occasion de relever de nombreux défis et j’en ai profité pour développer plusieurs compétences transversales essentielles. J’ai, entre autres, vulgarisé mon projet auprès de jeunes du secondaire grâce au programme Apprentis chercheurs et je me suis impliquée dans l’organisation du congrès Armand-Frappier 2021 à titre de présidente.
« J’ai eu beaucoup de plaisir lors de mon cheminement à l’INRS et j’en garde des souvenirs inoubliables. »
Quetia Joseph
Peu après ma maîtrise, j’ai travaillé à titre de technicienne spécialisée dans la Biobanque institutionnelle mère-enfant du CHU Sainte-Justine, à Montréal. La principale mission de cette biobanque est de soutenir les équipes dans leurs efforts en recherche pédiatrique. Mon travail contribuait donc à la mise au point de nouvelles stratégies diagnostiques et préventives, pour les enfants atteints de maladies rares et de cancer.
Savoir que mon travail avait un impact sur la santé des mères et des enfants du Québec était très valorisant. De plus, cela m’a également donné l’occasion de travailler avec des spécimens biologiques (échantillon sanguin, tissus, etc.) avec lesquels je n’avais pu travailler auparavant. Avec cette expérience, j’ai réalisé l’importance de la recherche dans le domaine diagnostique et pharmaceutique et son impact sur la santé des familles au Québec.
J’envisage maintenant de poursuivre ma formation dans le même domaine, cette fois au doctorat…